Steven Beckers, architecte et fondateur de BIGH, un projet de ferme urbaine à Bruxelles, parle à WoW!
Quand vous aviez 10 ans, est-ce que vous rêviez déjà de trouver des solutions, comme par exemple la ferme urbaine ?
Quand j’avais 10 ans, j’avais un mentor qui était mon grand-père, un ingénieur extraordinaire, qui a notamment construit l’Atomium, ici en Belgique. C’est quelqu’un qui a toujours développé les solutions tout à fait en avance sur son temps.
Mon père était architecte paysagiste et donc j’ai eu beaucoup de contact avec tout ce qui concerne le végétal.
Mon grand-père est décédé quand j’avais 14 ans et je savais déjà que je deviendrais architecte parce que… la construction et le fait de pouvoir influencer le monde et changer les choses m’a toujours intéressé.
Je n’avais pas une âme de fermier urbain parce qu’on en parlait pas à l’époque. Mais ce qui m’a toujours intéressé … c’est de voir les solutions plutôt que de voir les problèmes. J’ai toujours été inventif, même gamin. J’avais toujours voulu être comme mon grand-père.
Vous dites que vous voyez la ville comme une solution plutôt qu’un problème…
Je me suis passionné depuis pas mal d’années pour ce qui est ” cradle-to-cradle ” ou « l’économie circulaire ». Le projet BIGH est né de l’urbanisme et de l’architecture pour prouver qu’il y a les moyens de rendre la ville résiliante, saine, et de pouvoir produire en ville.
Il n’y a pas moyen de faire autrement que de créer des villes si l’on veut intégrer la population mondiale et sa croissance.
Quand on me dit qu’il y a trop de monde sur Terre, c’est un problème, je dis « si vous couchez toutes les personnes qui pourraient vivre un moment sur Terre » (on parle de tout voir augmenter à 12 à 15 milliards), « si vous couchez toutes ces personnes sur un lit, c’est la surface de la Belgique » .
Donc, ce n’est pas une question de place, c’est une question de ressources, c’est une question de solutions. Et on a qu’à être malin, comme les fourmis. Comme la Nature l’a fait, c’est d’arriver à ne pas créer de déchets et d’avoir un impact positif sur son environnement plutôt que de toujours se flageller à force de dire qu’on a un impact négatif.
Quelles réactions suscitent vos idées chez les enfants?
Il y a une réaction assez immédiate et justement amener les solutions et les présenter de manière très positive par rapport à tout ce qui se passe, de Al Gore et compagnie, qui ont dit: “on est des salauds, on a tout cassé, on a tout abimé” et qui souvent n’apportent pas vraiment de solutions.
Je crois qu’il faut vraiment partir du fait qu’on peut agir sur notre environnement, et de manière positive.
Ce qui m’a fait déclencher ça : j’ai travaillé il y a quelques années avec Alain Hubert, qui est un explorateur qui a créé la base belge en Antarctique. Il m’a expliqué que six mois après avoir arrêté l’utilisation de plomb dans l’essence, on est arrivé à mesurer les effets dans la glace. J’ai dit c’est génial, ça veut dire qu’il y a moyen de mesurer nos impacts positifs.
A force qu’on nous dise qu’on fait mal, on a l’impression que ça ne sert à rien de faire mieux parce que de toute façon on est foutu. C’est le message totalement inverse qu’il faut donner aux jeunes aujourd’hui. Et les enfants en sont vraiment conscients.
Quand on a l’impression que tout va mal, on ne se rend pas compte qu’on a aussi amélioré les choses dans tous les domaines. C’est positif.
Il y a beaucoup de choses à réparer et à changer mais il y a beaucoup de choses qu’il faut continuer et encourager et arrêter de dire que tout est mauvais.
Il ne faut pas faire la révolution il faut faire une évolution intelligente de notre société aujourd’hui et cette crise du corona tombe à pic.
Je ne dis pas que c’est une bonne chose mais on se rend compte qu’on est très dépendant de la mondialisation et tous ces éléments-là. Sans être catastrophiste, il est clair que tout ce qui est économie circulaire, le fait de commencer à produire non seulement sans déchets mais aussi localement et éviter les transports etc, la notion de la résilience urbaine, c’est aussi la notion de la résilience de l’Europe.
J’ai peur que la crise du corona nous emmène dans l’autre sens parce qu’il va y avoir une panique économique qui va faire que les gens vont vouloir revenir à ce qui était il y a quelques mois. Mais quelque part c’est impossible.
On ne peut pas continuer comme ça. Je crois que les jeunes s’en rendent compte. Il faut en tout cas miser sur cette énergie-là pour changer les choses.